Bonjour Julie, peux-tu te présenter s’il te plait ?
Je m’appelle Julie, j’habite à Paris mais je suis originaire de Cannes dans le sud de la France, je travaille dans le droit mais j’ai toujours été attirée par la nature. J’ai toujours fait du sport en famille et me suis rapidement orientée vers la course à pied pendant plusieurs années (semi-marathon) et vers la musculation ces dernières années pour les aspects force physique et dépassement de soi. Avec Anaïs nous avons souvent fait de la randonnée ensemble étant plus jeunes notamment dans les Alpes du Sud.
Anaïs habite également Paris mais est originaire du sud-est. Elle travaille dans l’environnement et la gestion des milieux naturels. Elle apprécie particulièrement les sports de nature (randonnée, escalade) et s’est récemment mise à la course à pied pour préparer le GR 20.
Déjà expérimentées en randonnée ?
Nous avons toutes les deux fait des randonnées à la journée souvent ensemble en étant plus jeunes. On randonnait souvent en montagne avec un peu de dénivelé, le Mercantour était notre terrain de jeu de prédilection. En grandissant nous avons chacune continué à randonner un peu partout lorsque l’occasion se présentait. Notre expérience de l’itinérance s’est limitée à 4 à 5 jours, rien d’aussi conséquent que le GR 20.
Peux-tu nous conseiller quelques randonnées ?
La randonnée du lac d’Allos, le Thiers, le lac de Vince, la Vallée des Merveilles, le sommet du Piolit. Ce sont des randos accessibles aux paysages variées et avec une belle récompense à la clef : lacs, sommets, peintures rupestres. Ce ne sont pas les randos qui manquent dans la plus belle région de France !
Quid de ton GR20 ? Quelle période, quel itinéraire ?
Concernant THE GR 20, nous avons décidé de partir toutes les deux, entre amies d’enfance la deuxième semaine de juin. Nous sommes parties du nord et l’avons parcouru jusqu’à Conca, bref le « vrai » GR quoi ! On avait planifié de le faire en 14 jours initialement. Finalement, la forme étant au rendez-vous nous l’avons fait en 11 jours et 1h30.
Quel était le contexte de vouloir réaliser le GR20, et quid de la préparation ?
Nous avons toujours entendu parlé du GR 20 autour de nous, ça faisait partie des choses que l’une comme l’autre on souhaitait réaliser dans notre vie. Cette année, nos contextes de vie respectifs (travail, études) permettaient de l’envisager sérieusement et au détour d’un apéro en février, nous nous sommes lancées le défi de prendre les billets pour le faire au mois de juin. Cette perspective nous rendait à la fois excitées et anxieuses.
Pour nous préparer, j’ai conservé mon rythme de sport habituel et soutenu et Anaïs s’est mise à la course à pied. Nous avons fait une randonnée avec des sacs d’environ 10kg et nos chaussures pour tester un peu (nous avions peur des ampoules).
Quel équipement avais-tu emporté ?
Nous étions parties sur un objectif de sac de 12-13 kg avec un maximum de 15kg dans le pire des cas.
J’avais un sac de 50L neuf (Quechua) qui pesait au final 13 kg avec l’eau. J’avais une gourde de 1.5L ce qui était un minimum pour moi, j’ai eu à certains moments à me rationner sur des parties sans sources.
Anaïs avait un sac de 60L (Quechua) qui pesait autour de 14 kg avec l’eau. Elle avait un CamelBak d’une capacité max de 2L mais rempli à 1.5L la plupart du temps, ce qui lui suffisait pour la journée.
Nous sommes parties avec 2 tenues complètes : 2 tee-shirts, 2 sous-vêtements, un short, un pantalon, un haut technique, un collant, des tongs, un maillot, un vêtement contre le froid et la pluie, une paire de gants, 2 paires de chaussettes, un poncho de pluie et une serviette. On avait des chaussures de randonnée (et non de trail), Quechua et Merrell. J’avais des chaussures plutôt basses et Anaïs des chaussures hautes.
On était en bivouac et en autonomie totale. Nous avions donc une tente, des duvets en plume et 2 matelas, un camping gaz et une cartouche (qui nous a peu servi grâce aux cuisines d’été accessibles dans les refuges), une casserole, des écocups et couverts tout en un.
En ce qui concerne la nourriture, nous sommes parties avec un repas lyophilisé chacune par jour pour 15 jours et qui nous servaient de repas du soir (et qui ne sont pas si mauvais ! Certains même plutôt bons). Niveau qualité/praticité/poids, nous validons ! En complément, on est parties avec un saucisson et un cake pour les premiers pique-niques, 700g de fruits secs chacune, 6 barres de céréales chacune et du muesli pour le matin. Pour les repas du midi, on se ravitaillait presque tous les jours aux épiceries sur le parcours (pain, saucisson, fromage, maquereaux, fruits et … bière !).
On avait reparti la pharmacie entre nos deux sacs.
Nous étions parties avec 320€ d’argent liquide chacune ce qui a été largement suffisant en étant en bivouac et du fait d’avoir doublé des étapes.
Encore des névés sur le parcours à la mi-juin ?
Heureusement, nous n’avons rencontré aucune difficulté liée à la neige. Mais deux semaines avant, des passages étaient encore difficiles et praticables uniquement avec crampons et piolets. Nous avons donc eu de la chance mais ça a été un sujet de préoccupation jusqu’à la veille du départ.
Tes impressions positives ?
Déjà les paysages, même si nous nous attendions à ce que ce soit beau, nous avons été impressionnées par l’immensité et la diversité des paysages sur tout le parcours.
Ensuite les gens. Les rencontres ont été impressionnantes par leur nombre, leur facilité. Nous avons été touchées par la solidarité et la bonne ambiance tout au long du parcours. Les gardiens sont souvent accueillants, serviables et drôles (ne pas s’arrêter aux quelques accueils froids de certains refuges). L’arrivée aux refuges le soir était à la fois un moment de soulagement et de partage, que nous attendions avec plaisir. L’arrivée était parfois couronnée de félicitations de personnes croisées plus tôt et de partage de bières en terrasse.
Nous étions initialement parties à deux et ne nous attendions pas à ce que notre groupe s’enrichisse de quelques gais lurons supplémentaires. Nous avons marché la moitié du parcours avec deux autres binômes d’amis d’enfance avec qui nous avons partagé fous rires, chansons, fatigues et souffrances. Nous espérons que la complicité née sur le chemin soit annonciatrice d’une amitié (dédicace à François, Jérémie, Jimmy et Guillaume !)
En ce qui me concerne, quelques frayeurs se sont transformées en de réels bons souvenirs. J’ai par exemple rencontré une femme à Vizzavona qui m’a spontanément offert ses bâtons voyant que je n’en avais pas. Ou encore, l’achat en catastrophe d’une nouvelle paire de chaussures de randonnée à Asco après un décollement inattendu de ma semelle et qui a tenu rafistolé pendant un jour avec du sparadrap.
Du négatif ?
Du fait que l’on ai décidé de doubler certaines étapes, plusieurs jours s’étiraient en longueur. Les fins de journées ont été du coup quelques fois gouvernées par l’attente d’atteindre le refuge plutôt que par le plaisir de marcher dans un tel environnement. Le fait de suivre le balisage demandait une vigilance constante (et nous nous sommes quand même trompées quelques fois sans s’éloigner trop loin), même s’il faut reconnaître que souvent le parcours était bien tracé. Par ailleurs, les installations trop rudimentaires des refuges rendaient certains soirs un peu moins agréables (douches et WC sales, pas entretenus et pas assez nombreux) …
Ton plus gros coup de cœur ?
Le meilleur moment pour nous deux a sans doute été l’après midi et la soirée passés à la bergerie de Croci. Nous n’étions pas censées nous arrêter mais à la vue du risque d’averses, nous sommes restées sur place et heureusement ! Tous les ingrédients d’un moment unique et hors du temps été réunis : gardiens excessivement gentils et drôles, moments de partage et de rigolade entre amis, la perspective d’une arrivée proche, un magnifique couché de soleil et l’exceptionnelle confiture de clémentine maison pour couronner le tout !! Magique ! Bise à Ludo et Louis, deux gardiens typiquement corses et accueillants.
Ton étape et ton refuge préféré ?
L’étape qui nous a le plus marqué (bien qu’il soit dur de choisir !) est celle de la pointe des éboulis (Monte Cintu) qui correspondait à notre 4ième jour. Le fait de savoir que nous atteignons le point culminant du GR était gratifiant, les vues étaient à couper le souffle et nous étions dans une super forme physique et mentale. Les paysages étaient très variés car nous avons vu des névés, de la pierre, un lac et de la prairie ! D’ailleurs, si nous devions refaire une partie du GR, nous sommes d’accord pour choisir le parcours entre le Monte Cintu et les lacs de Mélo et Capitelo.
Pour le refuge, comme nous l’avons dit, la bergerie de Croci a été un véritable coup de cœur.
Un message à passer, un remerciement ?
Personnellement, je suis ravie d’avoir partagé cette expérience avec mon amie de toujours, Anaïs ! Jamais je n’aurai pu envisager vivre ça avec quelqu’un d’autre et avec le recul, nous avons formé un duo très soudé et complémentaire, qui s’est beaucoup entraidé.
Au-delà de ce clin d’œil bien mérité, nous devons faire honneur à notre quatuor masculin qui a largement contribué à la réussite de ce GR et à ses bons souvenirs ! On se retrouve bientôt les gars autour de petits pains de chocolat !
Un objet ou une astuce que tu pourrais partager ?
Incontestablement, la crème pour les pieds, anti-frottements et ampoules (type Nok) a été particulièrement utile puisque nous n’avons eu aucun problème aux pieds ce qui n’est pas négligeable. Suite aux mésaventures de chaussures, quelqu’un nous a prêté une mini sangle de serrage qui s’est avérée très pratique et peut servir à diverses choses d’où son utilité, d’autant que cela ne prend pas de place dans le sac.
D’autres conseils pour les lecteurs qui préparent le GR20 ?
Nous sommes très contentes d’avoir réussi le défi sportif de faire le GR en entier en 11 jours et 1h30 mais si cela était à refaire, nous nous sommes dis qu’il serait préférable de le faire en plusieurs fois pour réellement prendre le temps et profiter des paysages, des cascades, des points de vue sans regarder la montre. Il faut aussi être conscients que lorsque l’on entame le GR20, et surtout la partie nord, il faut s’attendre à de longues parties d’escalade qui n’ont à voir avec une randonnée classique. Elles ne sont pas insurmontables mais autant s’y préparer.
Si tu envisageais de le refaire le GR20, changerais-tu quelque chose ?
Si nous devions refaire le GR20, nous prendrions une tente plus légère (la notre pesait 3kg) et nous mangerions certains soirs dans les refuges. Nous avons toutes les deux eu des problèmes physiques car Anaïs a rapidement eu mal aux genoux et je me suis fais une entorse à 3 jours de l’arrivée. Il faut donc peut être anticiper certaines blessures (genouillère) et surtout être vigilants sur tout le parcours là ou l’on met les pieds.
Envie de rajouter quelque chose ?
Pour les amoureux de la nature et les sportifs : lancez-vous, ce que vous vivrez sera unique !!
Un grand merci Julie pour ton retour d’expérience ! C’est vrai que le mois de juin est « quitte ou double » concernant l’enneigement sur le GR20, et lors des années où la neige est tombée tardivement et en abondance, les crampons et piolets sont de rigueurs sur certains passages. Merci pour la qualité de ton interview, on vous souhaite à toutes les deux de pouvoirs continuer de randonner ensemble aussi longtemps que possible, et avec vos 4 nouveaux amis aussi bien sûr ! A bientôt !
Simplement merci de m’avoir fait rêver.
Bravo.